Festival des Voiles de Travail – Granville 2025

Un Planktonaute sous le chapiteau de la Granvillaise


Récolte du plancton à bord de la Comatule, canot à misaine, dans la Baie de Saint-Vaast-la-Hougue (1894)

Cette gravure symbolise mon engagement de Planktonaute invité au Festival des Voiles de Travail de Granville : faire dialoguer histoire maritime, sciences et émerveillement devant le monde invisible du plancton, et sensibiliser le public à l'importance de préserver ce trésor inestimable.

Entre science invisible et patrimoine vivant


Granville
a vibré du 20 au 24 août 2025 au rythme du Festival des Voiles de Travail, rendez-vous maritime incontournable de la côte normande (sa 13e édition).
Dans le port et sur les quais, la mer et ses traditions se sont offertes aux visiteurs : vieux gréements, chants marins, artisans, démonstrations, animations… et même un peu de plancton !

Un stand dédié au Plancton sous le chapiteau de la Granvillaise

Invité par Granville Terre & Mer et l'Association des Vieux Gréements Granvillais (AVGG), j'ai eu le plaisir de proposer une animation originale : Installé sous le chapiteau de la Bisquine La Granvillaise, j'ai pu faire découvrir au public le monde fascinant et invisible du plancton à l’aide d'un microscope avec écran LCD.
Observer ces organismes dérivant au gré des courants, comprendre leur rôle essentiel – produire de l’oxygène, nourrir les huîtres, initier toute la chaîne alimentaire – c’était l’occasion de rappeler que ce patrimoine vivant est indissociable de la mer et de ceux qui en vivaient.

Mon stand sous le chapiteau de la Granvillaise

À côté du microscope, j’avais mis à disposition un classeur pédagogique :

  • une page de garde présentant une gravure historique du laboratoire maritime de Tatihou (voir ci-dessous),

  • une fiche pour me présenter, ancien professeur de SVT devenu « Planktonaute » membre de l’association Plankton Planet, et la justification de ma présence au Festival (voir ci-dessous),

  • une fiche sur la pêcherie du Plat Gousset, patrimoine granvillais encore bien visible à marée basse, riche de biodiversité,

  • une fiche relatant mes sorties à bord de La Granvillaise avec prélèvements de plancton,

  • une fiche pédagogique proposant une activité pour construire un réseau trophique de la Baie (cycle 3 des écoles et des collèges),

  • et enfin une fiche reliant directement plancton et huîtres, en écho à la démonstration prévue dans le port.



Pourquoi une animation "Plancton" à Granville ?
Une tradition scientifique normande et maritime


Affiche issue d’archives du Muséum National d’Histoire Naturelle présentée au laboratoire maritime de Tatihou

  • Dès 1887, le Laboratoire maritime de Tatihou, annexe du Muséum National d’Histoire Naturelle, fut fondé par Edmond Perrier sur l’île de Tatihou, face à Saint‑Vaast‑la‑Hougue. Il devint un lieu de recherche majeur en biologie marine, accueillant étudiants et chercheurs du monde entier.

  • Station expérimentale pionnière, équipée d’aquariums d’eau de mer, de laboratoires et de bateaux (ici un canot à misaine, la Comatule) pour pêcher et étudier la faune planctonique locale, elle permit d’acquérir des données sur les espèces du phytoplancton et zooplancton de la baie.


La rencontre entre science et patrimoine

Au-delà de mon stand, le Festival m’a permis de renouer avec un autre aspect essentiel : le patrimoine maritime vivant. Un des moments forts fut sans doute la démonstration de pêche à la drague aux huîtres à bord de La Granvillaise.
Milou et Victor à bord de la Granvillaise se préparent à plonger la drague devant le public


Remontée de la drague à huîtres à bord de la Granvillaise
Autrefois, ces bisquines rapides et puissantes traînaient leurs dragues sur le fond de la Baie du Mont-Saint-Michel pour en remonter les huîtres. Devant le public, la manœuvre fut rejouée – cette fois sans huîtres – pour montrer la technique, les gestes et la force de l’équipage.


Dragage des huîtres sauvages dans le fond de la Baie depuis la Bisquine

L’exposition sur la Bisquine sous le chapiteau permettait au public d’approfondir l'histoire de la Bisquine la Granvillaise et de toutes celles qui lui ont précédé.

Philippe en train de trier les photos et les associer à la légende la veille du Festival

Toutes les photos exposées (pêche, équipages, bisquines, équipements, régates, tri des huîtres, nettoyage, transport, vente...) proviennent pour la plupart de la collection de cartes postales de Philippe, autre membre passionné de l'AVGG, et lui-même navigateur.

Des émotions partagées tout au long du Festival avec certaines personnes qui tentaient de retrouver un aïeul ou bien une connaissance Terre-Neuvier ayant participé à la pêche à la morue sur les bancs de Terre-Neuve au siècle dernier. Un visage, un nom à retrouver, un patron, une voile...Le moindre indice...

Joël accueille les visiteurs et propose de répondre à leurs questions


Une des photos exposées - Remontée de la drague (début XXe)

Interview sous le chapiteau de la Granvillaise


Joël dans son rôle de pédagogue historien auprès du public et des enfants en quête d'une chasse au trésor


Quelques repères historiques :

  • Dès les années 1820-1830, les dragues métalliques commencent à remplacer les outils plus rudimentaires (râteaux, grappins) pour la récolte des huîtres plates en baie du Mont-Saint-Michel et dans la baie de Cancale.

  • La bisquine – voilier puissant à trois-mâts aurique, développé dans les années 1850-1860 à Cancale et Granville – devient alors le bateau idéal pour ce type de pêche : solide, rapide et capable de traîner plusieurs dragues lourdes.

  • L’âge d’or se situe entre 1870 et 1900, quand des flottilles entières de bisquines sortaient de Granville et Cancale pour draguer les bancs d’huîtres. Ces campagnes pouvaient rassembler des dizaines de voiliers en baie du Mont-Saint-Michel, une image emblématique du patrimoine maritime local.

  • Au début du XXᵉ siècle, la surexploitation des bancs d’huîtres sauvages, associée à l’évolution des techniques de pêche, entraîne un déclin progressif de cette pratique traditionnelle.


Un parallèle saisissant s’imposait alors :
  • sous le microscope, le planc ton dont se nourrissent les huîtres et les autres organismes de la Baie de Granville, fraîchement prélevé le matin avant de venir au Port.
  • sur le bateau, l’outil ancestral, la drague, qui servait à récolter les huîtres adultes.
Deux échelles, deux regards, mais une même histoire commune entre l’homme et la mer.

Le plancton sous le chapiteau :

Emerveiller pour instruire...


...instruire pour sensibiliser, sensibiliser pour préserver.

Qu’est-ce que le plancton ?

Le plancton regroupe l’ensemble des organismes, animaux ou végétaux, bactéries, virus, qui dérivent au gré des courants (du grec "planktos" --> Errer, dériver).

On y trouve :

  • Phytoplancton : micro-algues, véritables « plantes » des océans qui produisent de l’oxygène grâce à la photosynthèse.



Diatomées (Microscope optique x100)


Diatomées (Microscope optique x400)
  • Zooplancton : petits animaux, larves et organismes qui se nourrissent du phytoplancton ou d’autres planctons.


Copépodes (MO x40)

Micro-méduse - Espèce microscopique ou "bébé méduse ? (MO x40)


Une autre micro-méduse en mouvement (MO x40)
Les visiteurs ont été nombreux à être surpris par la vie que pouvait contenir une goutte d'eau et une réflexion qui est revenue souvent : "Mais alors, lorsqu'on boit la tasse en nageant, on avale tout ça ???" 😯


Une larve d'huître prélevée à la pêcherie de Granville (MO x100)

Cette larve d'huître qui deviendra adulte au bout de 3 ans, si elle n'est pas mangée par d'autres...


Le cycle de vie de l'huître - Source https://www.huitresmarennesoleron.info/terroir_metier.html

...Et l'huître adulte sera peut être mangée un jour par vous...ou moi...


Balade sous les chapiteaux et sur le Port


La statue de Georges-René Péville Le Pelley au Square de l'Arsenal

Né mousse sur les navires terre-neuviens, Pléville Le Pelley navigua entre les rangs : d’un corsaire granvillais à gouverneur du port de Marseille, puis à un haut fonctionnaire au ministère de la Marine. Son parcours littéralement exceptionnel lui valut d’être décoré de plusieurs distinctions honorables, notamment :

  • Chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis,

  • Ordre de Cincinnatus (officiers et diplomates qui se sont distingués pendant la guerre d'indépendance des États-Unis),

  • Légion d'honneur ActuNautique.comvoiles-de-travail.

Lors du festival, ce fil rouge marin et historique s’est déployé au cœur des animations : expositions, conférences, projections et spectacles dédiés ont mis en lumière la vie et l’odyssée humaine de Pléville Le Pelley, incarnant ainsi un hommage vibrant à sa mémoire

Profitant de quelques moments libres, je suis allé à la rencontre des autres animations du Festival. Les chapiteaux rivalisaient d’authenticité et de passion : marins, navigateurs, artisans de la voile, exposants, artistes peintres, artistes en herbe.

De nombreuses animations se sont succédé sur le port, sur les vieux gréements, et même sur l’eau. 


Vue du haut de la rue des Juifs


Le programme du jour


Un public chaleureux assiste au spectacle des Terre-Neuvas

Les Terre-Neuvas tranchent la morue comme jadis


Chants et musique sous le chapiteau de la Granvillaise


Granville : 400 ans de Grande Pêche


Exposition de maquettes de vieilles voiles de Travail


Le fil rouge du Festival 2025 : Pléville Le Pelley

Le chapiteau de la Granvillaise a abrité le temps du Festival une œuvre originale en métal représentant Georges-René Pléville Le Pelley, réalisée par le soudeur normand Philippe Salmet. Un petit clin d'œil avec la Nuit des Soudeurs qui a eu lieu à Granville les samedi 2 et dimanche 3 août 2025.

✍️ Blog de Philippe Salmet : naturemetal.canalblog.com


Annie, et d'autres adérentes de l'AVGG initient les enfants à de la confection de bracelets et de porte-clés (ici des pommes de touline) sous le chapiteau de la Granvillaise 


Tout un art qui se transmet de générations en générations...


Hélène, de l'AVGG, en costume traditionnel de vendeuse d'huîtres

Conférence ludique pour les enfants

Conférence historique pour les plus grands


Le GECC (Groupe d'Etude des Cétacés du Cotentin)


Sous le chapiteau de Sweety around ze world, de belles planches de dessins

Sarah, une des deux artistes et navigatrices, en train de dessiner, peut-être pour un prochain album...


Le Repaire des Moussaillons pour une montée...d'adrénaline...en toute sécurité !

Le bassin de modélisme naval (Repaire des Moussaillons)


Tenir un cap, virer de bord, régler sa voile, sentir le vent...avec une télécommande


Tenir un cap, virer de bord, régler sa voile, sentir le vent...à bord d'un Optimist


De la musique folklorique accompagne le public pendant tout le Festival dans une bonne ambiance

Cela se poursuit même sur les Vieux Gréements


Quelques magnifiques vieilles voiles étaient aussi à l’honneur le long des quais

Un hommage à un grand absent : Le Marité le dernier terre-neuvier à voiles français



Depuis fin 2023
, le Marité est à l'arrêt et en cale sèche à Port-en-Bessin (Calvados), suite à la découverte d’un champignon lignivore (proche de la mérule) qui a gravement endommagé sa coque.



Milou à bord de la Granvillaise


Vieux gréements à quai


La Fleur de Laimpol voilier aux multiples vies


La Croix du Sud III de l'Association "les Voiles Ecarlates"

La Croix du sud III


🎶 Le travail c'est la santé 🎶, rien faire c'est...la conserver !🎶


Une mémoire à transmettre

Cette édition 2025 restera pour moi une expérience marquante : être à la fois acteur scientifique et témoin patrimonial. Mon microscope, posé à côté des voiles de La Granvillaise, illustrait bien ce lien intime entre l’invisible (le plancton) et le visible (les Vieux Gréements et les gestes maritimes).
Le Festival des Voiles de Travail est plus qu’un rassemblement de vieux gréements : c’est un espace où la mémoire se partage, où science et culture maritime dialoguent, et où l’on comprend que la mer, hier comme aujourd’hui, reste au cœur de notre identité.

Ces rencontres m’ont rappelé combien ce Festival est une fête du partage.


En savoir plus sur :


Remerciements :
  • Un grand merci à Mélaine (Granville Terre & Merpour sa bienveillance et son écoute par rapport à ma demande de participation pour ce Festival 2025 😊
  • Un autre grand merci à l'AVGG pour son accueil chaleureux et pour avoir accepté sans hésitation de m'abriter sous leur chapiteau 😉
  • Et un grand bravo à tous les bénévoles qui ont donné leur temps sans compter pour faire vivre le Festival ! 👏


On se lasse de tout, sauf d’apprendre...




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